Matthieu 17, 14-20
Quand ils eurent rejoint la foule, un homme s’approcha de Jésus, et tombant à ses genoux, il dit : « Seigneur, prends pitié de mon fils. Il est épileptique et il souffre beaucoup. Souvent il tombe dans le feu et, souvent aussi, dans l’eau. Je l’ai amené à tes disciples, mais ils n’ont pas pu le guérir. » Prenant la parole, Jésus dit : « Génération incroyante et dévoyée, combien de temps devrai-je rester avec vous ? Combien de temps devrai-je vous supporter ? Amenez-le-moi. » Jésus menaça le démon, et il sortit de lui. À l’heure même, l’enfant fut guéri. Alors les disciples s’approchèrent de Jésus et lui dirent en particulier : « Pour quelle raison est-ce que nous, nous n’avons pas réussi à l’expulser ? » Jésus leur répond : « En raison de votre peu de foi. Amen, je vous le dis : si vous avez de la foi gros comme une graine de moutarde, vous direz à cette montagne : “Transporte-toi d’ici jusque là-bas”, et elle se transportera ; rien ne vous sera impossible. »
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Chers frères et sœurs
Ce soir, nous sommes réunis pour prier pour la paix, comme nous le faisons chaque mois. Nous sommes à un an, à quelques jours près, du début de la guerre en Ukraine avec l'invasion du pays par la Russie. Cela nous semblait inconcevable, malgré les signes, mais la guerre est arrivée comme un voleur dans la nuit et n'a pas quitté ce pays depuis. Pendant douze longs mois, il y a eu des combats acharnés avec des morts, des destructions. Une année entière pour rien, voire une année entière pour beaucoup de mal. Et le prix de tout cela a été payé, non seulement par les soldats ukrainiens et russes, mais aussi par la population ukrainienne, dont un grand nombre, près de 8 millions, sont exilés en Europe, tandis qu'un nombre presque égal a quitté sa maison et vit dans son propre pays comme réfugié.
L'Ukraine a perdu la paix, elle l'a tellement perdue qu'aujourd'hui le mot paix n'est plus prononcé, tandis que les voies du dialogue semblent exclues, impossibles. On pourrait dire que la paix est impossible. Et pourtant, le chemin de la paix perdue doit être retrouvé au plus vite.
Les disciples de Jésus se trouvent aujourd'hui démunis face au mal de la guerre. Les chrétiens européens, les chrétiens d'Europe orientale, ont été bafoués par la guerre. La guerre les a divisés et a révélé leur faiblesse, incapables d'aider la paix. Et le langage de chacun est devenu de plus en plus dur, militaire, conflictuel : plus la guerre durait, plus la paix était perdue.
Pourtant, les parents ukrainiens pleurent pour leurs enfants. Il faut les écouter, comme Jésus a écouté ce père qui s'est approché de lui et a dit : "Seigneur, prends pitié de mon fils !" Aujourd'hui, les enfants d'Ukraine ne sont pas secoués par l'épilepsie, mais par un mal qui fait souffrir tout le monde, qui fait mourir tout le monde, jeunes, vieux, adultes, enfants.
Il n'y a pas de fin en vue. Il y a un démon : celui de la guerre, qui est peut-être le démon le plus terrible, qui provoque les convulsions non pas d'une seule personne, mais d'un peuple entier. Dans la guerre, les forces du mal s'emparent du destin d'un peuple, l'emprisonnant dans un destin insupportable.
Ce père dit à Jésus : "je l'ai amené à tes disciples, mais ils n'ont pas pu le guérir."
Bien souvent, chers frères et soeurs, ici aussi, nous avons prié ensemble pour la paix, mais un an après le début de cette guerre, nous voyons combien ce conflit devient éternel. Oui, il semble durer sans fin. Nous n'avons pas pu le guérir, nous n'avons pas pu aider à sa conclusion pacifique, nous, disciples de Jésus, et avec nous, tant d'autres Européens.
Sommes-nous présomptueux de vouloir encore la paix ? Nous perdons même la conscience que cette guerre est un drame et que la paix est perdue depuis trop longtemps. Écoutons alors la voix d'une mère, écoutons alors la voix d'un père ; un père et une mère savent combien la guerre est horrible. Mais aujourd'hui leur voix n'est pas entendue, elle est plutôt écrasée par la logique et la propagande de la guerre.
Jean XXIII, qui avait connu de très près l'horreur des deux guerres mondiales, une horreur trop oubliée aujourd'hui, Jean XXIII, à la veille de Vatican II, a dit une phrase simple mais essentielle : "Les mères et les pères de famille détestent la guerre." Le Seigneur accueille la douleur des pères et des mères qui pleurent leurs enfants, qui se préparent avec angoisse à une autre année de guerre.
Dans l'Évangile, Jésus a parlé de manière menaçante et le diable est sorti du garçon, qui a été guéri. Les hommes de notre génération peuvent-ils être plus sourds que ce démon à la voix du Seigneur ? Dans les temps à venir, la voix de Jésus parle aux cœurs et aux esprits de ceux qui décident de la guerre. Chassez la haine et faites plier la logique du conflit, pour qu'enfin ce pays soit libéré du démon de la guerre. La paix n'est pas impossible et ce qui semble impossible ne l'est pas : rien ne sera impossible.
Ne cessons donc pas de prier et, encouragés par la parole de Jésus, continuons à prier avec insistance : "Demandez et l'on vous donnera, cherchez et vous trouverez, frappez et l'on vous ouvrira."
Les disciples, réprimandés par Jésus - et nous avec eux - s'approchent du maître et lui demandent : "Pour quelle raison n'avons-nous pas pu expulser ce démon ?" Les paroles de Jésus sont une réponse précieuse pour nous aujourd'hui : "En raison de votre peu de foi. Amen je vous le dis, si vous avez de la foi gros comme une graine de moutarde, vous direz à cette montagne : Transporte-toi d'ici jusque là-bas et elle se transportera. Rien ne vous sera impossible".
Ce n'est pas impossible, notre petite foi dans la prière sera capable de déplacer des montagnes de haine, de rancune, sera capable de changer une géographie de la guerre en une géographie de la paix.
Parle, Seigneur ! Parle, Seigneur, menace le démon de la guerre, chasse le mal de la guerre, et le chemin de la paix sera trouvé. Que cela arrive pour la consolation de chaque mère, chaque père, chaque enfant, de tout le monde.
Amen.
La prière de la Communauté de Sant'Egidio est retransmise en direct sur le site, Facebook et YouTube le lundi à 20h.
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