5 avril 2022
basilique Sainte Marie du Trastevere
Marco Impagliazzo
Jean 4, 46-54
Jésus arriva donc en Galilée ; les Galiléens lui firent bon accueil, car ils avaient vu tout ce qu’il avait fait à Jérusalem pendant la fête de la Pâque, puisqu’ils étaient allés eux aussi à cette fête. Ainsi donc Jésus revint à Cana de Galilée, où il avait changé l’eau en vin. Or, il y avait un fonctionnaire royal, dont le fils était malade à Capharnaüm. Ayant appris que Jésus arrivait de Judée en Galilée, il alla le trouver ; il lui demandait de descendre à Capharnaüm pour guérir son fils qui était mourant. Jésus lui dit : « Si vous ne voyez pas de signes et de prodiges, vous ne croirez donc pas ! » Le fonctionnaire royal lui dit : « Seigneur, descends, avant que mon enfant ne meure ! » Jésus lui répond : « Va, ton fils est vivant. » L’homme crut à la parole que Jésus lui avait dite et il partit. Pendant qu’il descendait, ses serviteurs arrivèrent à sa rencontre et lui dirent que son enfant était vivant. Il voulut savoir à quelle heure il s’était trouvé mieux. Ils lui dirent : « C’est hier, à la septième heure, (au début de l’après-midi), que la fièvre l’a quitté. » Le père se rendit compte que c’était justement l’heure où Jésus lui avait dit : « Ton fils est vivant. » Alors il crut, lui, ainsi que tous les gens de sa maison. Tel fut le second signe que Jésus accomplit lorsqu’il revint de Judée en Galilée.
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Ce deuxième signe que Jésus a accompli à Cana, après avoir changé l'eau en vin, met en scène un fonctionnaire du roi qui avait un fils malade. Ce fonctionnaire, comme nous l'avons entendu, est venu demander l'aide de Jésus. Il est venu demander l'aide de Jésus avec insistance, comme un homme qui prie selon l'enseignement de Jésus, qui recommande l'insistance dans la prière. Or le maître, le Seigneur, face à une telle insistance, lui dit : "Va, ton fils est vivant."
Nous avons entendu ce que dit l'Évangile de Jean : " L'homme crut à la parole que Jésus lui avait dite et il partit ".
Le disciple est celui qui se met à croire la parole que Jésus lui dit et se voit transformé, tout comme ce fonctionnaire vit la vie de son fils transformée. Mais il se trouve aussi transformé parce que son propre cœur est transformé, celui du fonctionnaire, par l'annonce. Cet homme revient différent, il revient neuf, stimulé par cette nouvelle et cette guérison, le fonctionnaire sait qu'elle vient de Dieu. C'était un homme de pouvoir, mais il comprend que la guérison ne vient certainement pas de lui, mais plutôt de ce premier pas confiant qu'il a fait en se confiant au Seigneur.
Ainsi, frères et sœurs, cette histoire de l'évangéliste Jean est une histoire que nous retrouvons plusieurs fois dans l'Évangile : des hommes et des femmes qui, confiants dans la parole du Seigneur, dans la rencontre avec Jésus, voient leur cœur changé, précisément parce qu'ils ont écouté la parole. Et tandis que nous vivons le chemin du Carême, "cet homme s'est mis en route", nous dit l'Évangile, nous sentons chaque jour que le Seigneur, qui touche nos cœurs avec sa parole, nous guérit de la maladie qui affecte nos vies, qui pollue nos habitudes, qui est l'amour de soi. Cet homme s'était mis en route par amour pour son fils et avait été libéré, précisément parce qu'il s'était mis en route. Et il était changé, son cœur était différent.
L'expression "partir", même pour ceux qui vivent toujours au même endroit, nous la comprenons mieux, aussi parce que nous vivons dans le Carême, dans la discipline de chaque jour : ne pas rester immobile en soi ou ne pas faire le tour de soi, ce qui signifie essentiellement ne jamais bouger. Et cette discipline que nous vivons, particulièrement en ce temps où l'on nous demande de nous confronter à nous-mêmes, de lire davantage la Parole de Dieu, de la lire chaque jour, nous apprend à nous déplacer chaque jour dans cette Parole.
C'est là que ce signe, dans lequel on nous dit que cet homme s'est mis en route, reste pour nous aussi un point de réflexion. C'est une réflexion à partir des nombreux hommes et femmes qui se sont mis en route dans l'Écriture selon la parole du Seigneur, d'Abraham aux prophètes. Et de nombreux choix ont également été le fruit d'une souffrance intérieure, comme dans l'appel du prophète Jérémie : "Seigneur, je suis jeune, je ne sais pas parler, je ne suis pas l'homme qui doit parler à mon peuple" (cf. Jr 1, 6). Mais le Seigneur convainc Jérémie par sa parole. Et nous savons, à partir du livre du prophète Jérémie, comment le Seigneur le convainc : avec ces expressions que le prophète utilise, séduire, rendre puissant, vaincre.
Sœurs et frères,
il y a une souffrance intérieure, et c'est bien qu'il y en ait une, quand la parole fait de la place en nous, parce qu'elle réduit l'espace pour nous-mêmes et nous éloigne de ce chemin que nous avons l'habitude d'emprunter, ne serait-ce que celui de faire le tour de nous-mêmes et de nos habitudes.
C'est cette souffrance d'un cœur qui commence à exister dans la vie et qui se fait une place dans le désordre de tant de choses et d'amours. C'est une souffrance qui demande de la patience et de l'exercice. Mais, comme nous le recommande le Seigneur Jésus, il s'agit d'une souffrance qui se déroule dans le secret, celle de faire de la place à la parole et à la pensée du Seigneur dans notre cœur. C'est, en somme, se laisser vaincre par le Seigneur. Il y a quelque chose qui se passe dans le secret du cœur, parce que finalement, on trouve son cœur.
C'est pourquoi, en écoutant à nouveau cette histoire du fonctionnaire du roi, nous savons et croyons que ne pas rester bloqué dans nos habitudes sauvera notre cœur de la froideur, de l'amour-propre, de l'égocentrisme. Ce cœur qui s'élance expérimente la puissance du feu que le Seigneur a mis dans notre cœur pour que notre vie puisse changer, être communicative, parler d'amour, vivre avec l'amour du Seigneur.