Ecoutons la clameur de la Terre, avant qu'il ne soit trop tard pour tous

Editorial d'Andrea Riccardi

Le mois de juillet dernier a été le plus chaud jamais enregistré. Il est temps de prendre des décisions courageuses qui allient écologie et justice

La chaleur torride de l'été a atteint des sommets inquiétants. Les inondations en Belgique et en Allemagne - mais aussi le récent cyclone aux États-Unis - ont été impressionnants. Il est impensable de nier - comme certains le font encore - l'existence du changement climatique. Certains experts affirment que l'ère des méga-feux, difficiles à maîtriser, a commencé. Depuis la fin du mois de juillet, les incendies ont pris une ampleur inhabituelle, détruisant des millions d'hectares de forêt en quelques jours seulement. En Californie, l'incendie Dixie a détruit 250 000 hectares, obligeant de nombreuses personnes à fuir. En Algérie, il y a eu 90 décès des causes d’un incendie. En Italie, on a recensé 800 départs de feu simultanés, surtout dans le sud. L'île grecque d'Evia a été dévastée avec 100 000 hectares détruits ; en Turquie, ce sont 180 000 hectares. L'Australie, entre 2019 et 2020, a vu 17 millions d'hectares partir en fumée. Le feu a ravagé la Sibérie (16 millions d'hectares touchés cette année) avec des températures dépassant les 40 degrés.

Le feu augmente de façon exponentielle la masse de dioxyde de carbone en suspension dans l'air, ce qui contribue à la sécheresse du sol. La sécheresse et la hausse des températures sont à l'origine de ce phénomène.

Selon la NASA, le mois de juillet dernier a été le plus chaud depuis le début des relevés au milieu du 19e siècle. Le réchauffement climatique génère des phénomènes de plus en plus graves. Le principal problème est la perte progressive d'humidité dans les forêts et les espaces verts. Dans ces conditions, les températures élevées et le vent suffisent à déclencher un incendie. Il y a beaucoup de pyromanes. Les conséquences de ces actions irresponsables ont changé : un incendie se propage désormais plus rapidement en raison des conditions du sol, lesquelles facilitent aussi les inondations. La terre est devenue plus fragile, desséchée, si friable qu'elle ne peut résister aux pluies, aux températures élevées ou au vent. On l'a vu avec l'effondrement de milliers d'arbres dans le Trentin en 2018.

La terre s'effrite littéralement sous nos pieds : nous, Italiens, devrions le savoir, avec un pays exposé à l'érosion et une longue histoire de glissements de terrain et d'effondrements. Mais la Terre entière souffre.

Il y a quelques années, en Indonésie, des incendies catastrophiques ont pollué l'air du pays pendant des mois. Au Brésil, les feux de forêt ne sont plus contrôlés et dévastent d'immenses zones. On trouve sur le web des photos d'inondations dramatiques au Bangladesh, au Soudan, au Soudan du Sud ou en Inde. Nous sommes dans une conjoncture mondiale qui appelle des réponses mondiales, comme l'accord de Paris de 2016 a commencé à le faire. Cette année, l'Italie, avec la Grande-Bretagne, est coresponsable de la Cop 26, la réunion mondiale sur le climat.

L'heure est venue de prendre des décisions plus audacieuses pour freiner le réchauffement de la planète. Les initiatives personnelles visant à modifier les modes de vie sont également importantes.

Une écrivaine catholique américaine, Alessandra Harris, a proposé de réintroduire l'abstinence de viande le vendredi pour freiner l'élevage intensif et envoyer un signal. Plus largement, le pape François a écrit dans son encyclique Laudato si` : "une vraie approche écologique se transforme toujours en une approche sociale, qui doit intégrer la justice dans les discussions sur l’environnement, pour écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres".

La clameur de la Terre n'a pas été entendue depuis longtemps : il est temps de s'en rendre compte et de sortir de la surdité. La destruction de la Terre affecte les pauvres mais, au final, elle appauvrit tout le monde.

Editorial d'Andrea Riccardi paru dans Famiglia Cristiana du 12/9/2021

[traduction de la rédaction]